Travail

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Travail (au sens physique)

Définition

Le travail, au sens physique, est le produit d'une force et d'une longueur. La longueur est celle du déplacement dans la direction de la force.

Le travail mécanique est l'effet macroscopique visible (quand cet effet existe) de l'application d'une force.
Attention, il peut très bien y avoir application d'une force, sans travail mécanique produit. Et pour autant, cela ne signifie pas que rien n'est produit. Simplement, ce n'est alors pas du travail mécanique (au sens, bien visible, localisé et mesurable). Ce n'est pas pour rien qu'on accole fréquemment l'adjectif "mécanique". Par exemple il peut y avoir de l'échauffement et/ou de travail réparti diffusément sur la chaine de transmission de l'effort. Par exemple, soit l'application d'une clé sur un boulon pour tenter de le dévisser. Il arrive que le boulon ne bouge pas, malgré un effort considérable sur la clé. Pour autant, l'énergie déployée ne tombe pas dans un trou noir. La clé plie, fléchit, se courbe, se déforme éventuellement. Les angles du boulon se déforment. La température du boulon et de la clé s'élève. etc.
Il ne faut pas perdre de vue que les notions inventées et utilisées en physique sont là pour aider à faire de la modélisation. La meilleure possible. Mais il n'y a pas (devrait pas y avoir) de prétention de description parfaite du réel. Si on fabrique un réel qui permet à la modélisation (idéalisée) de bien s'approcher (réduction des frottements etc), alors les 2 vont bien s'accorder. ... Mais ce n'est pas toujours possible.

Même dans le cas mécanique le plus trivial et idéalisé, exercer une poussée verticale sur un objet, il y a pression à l'endroit du contact et donc forcément échauffement (même très léger) à cet endroit-là. La conversion en travail mécanique ne peut jamais être à 100%.

Intuitivement, on peut grossièrement illustrer le concept de travail par le portage d'un sac à dos en montée. (grossièrement car il y a en sous-jacent tous les problèmes de frottement).

Si on veut illustrer avec un exemple plus idéal, pensons à une voiture qu'on pousse en montée.
Si on pousse la voiture sur une belle route, bien horizontale (avec un revêtement bien lisse/plan) ... on voit qu'il n'y a pas vraiment d'effort ou de travail fourni. C'est encore plus net si on imagine pousser le véhicule dans une pente descendante. Là aucun travail n'est fourni.
A. Moatti a une meilleure illustration encore du non-travail d'un déplacement horizontal : le déplacement d'un bloc de métal huilé sur une surface lisse, ou d'un bloc de glace.

Le travail d'une force est l'énergie fournie par cette force lorsque son point d'application se déplace (l'objet subissant la force se déplace ou se déforme). Il est responsable de la variation de l'énergie cinétique du système qui subit cette force. Si par exemple on pousse une voiture, le travail de la poussée est l'énergie produite par cette poussée. Cette notion avec ce nom fut introduite par Gaspard-Gustave Coriolis1. Le travail est exprimé en joules (J), et est souvent noté W, initiale du mot anglais Work qui signifie travail. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Travail_d%27une_force)

Dans la définition physique, on parle bien de travail si et seulement si celui-ci modifie l'énergie (cinétique) de l'objet auquel s'applique ce travail. Il y a une sorte d'échange. En fait c'est plus qu'un échange, le travail est une énergie.

Un des intérêts de la définition du travail mécanique, nonobstant l'aspect idéalisé du concept, est de donner une dimension (Force x longueur) à cette mesure. Dimension qui s'avérera applicable à beaucoup d'autres sortes de "travail".


Dimensions

F = masse x accélération = Kg x m / s2

W = F x longueur = F x m = Kg x (m/s)2

  • Le joule n'est pas une unité fondamentale. C'est un raccourci pour condenser une combinaison de dimensions fondamentales.


Attention de ne pas confondre poids et masse. La masse s'exprime en kilos. Le poids s'exprime en newtons. Et poids = masse x g (où g est l'accélération due à la pesanteur, ie 9.81m/s2)

En fait, le poids est une force. La force exercée par la masse dans son champ de gravité (et grâce à ce champ).


Histoire

Il faut avoir à l'esprit que, à l'époque de la définition du concept (et des concepts voisins), le domaine est en cours de débroussaillement et il y a parfois confusion entre des notions voisines. Ainsi, il y a parfois confusion entre force et travail.
Sur ce point, je crois qu'il faut bien voir :

  • le travail mécanique comme une manifestation mécanique (visible, localisée, mesurable) d'une force. Un effet, une trace macroscopique/mécanique.
  • que le travail mécanique n'est (évidemment) pas la seule manifestation possible de l'application d'une force.
  • qu'il peut bien y avoir application d'une force sans travail mécanique produit

Le père du concept est a priori Coriolis (http://fr.wikipedia.org/wiki/Gaspard-Gustave_Coriolis). Mais Navier et Poncelet sont parfois aussi crédités, eg par F. Vatin.

L’élément marquant de cette période de la vie de Coriolis est sa réflexion sur les machines, qui se traduit en août 1826 par une note synthétique de huit pages à l’Académie, et en juillet 1829 par la publication d’un ouvrage austère, complexe et volumineux, le Calcul de l’effet des machines. C’est l’œuvre majeure qu’il publie dans ce domaine, son premier ouvrage, alors qu’il est déjà âgé de trente-six ans. La principale innovation y est la définition de la notion de travail, qu’il est le premier à donner ; il propose aussi de définir une unité pour le travail, « le dynamode » ; il remarque que la notion de force vive devrait s’appliquer à ½mv² et non à mv², afin d’éviter de parler en permanence des « demi-forces vives ». (Thèse Moatti, page 44)

Nous analyserons en détail son mémoire manuscrit de 1826 à l’Académie, car il comporte certains résultats souvent datés à tort de l’ouvrage de 1829 – notamment la définition physique du travail. Malgré sa complexité, mais compte tenu de son importance dans l’œuvre de Coriolis et dans sa carrière à partir de 1830, nous tentons d’analyser le Calcul. Nous examinons aussi, en parallèle, la seconde édition – bien que celle-ci date de 1844, après la mort de Coriolis : sous le nom de Traité de la mécanique des corps solides, elle comporte quelques ajouts par rapport à l’ouvrage de 1829. (Thèse Moatti, page 45)

Je proposerais de donner à la quantité en question le nom de travail. Ce mot ne fera confusion avec aucune autre dénomination mécanique (…) L’idée de force et de chemin y est attachée car on ne dirait pas qu’il y a un travail produit [là] où il y a seulement un effort exercé sur un point immobile comme dans une machine en équilibre. On n’appliquerait pas non plus l’expression de travail à un déplacement sans aucune résistance vaincue. Ce mot me paraît tout à fait propre à désigner la réunion des deux éléments chemin et force. - Coriolis, en 1826 in Thèse Moatti page 64

Attention, Coriolis lui-même parle de travail produit.

Effectivement, si appuyer sur un mur (sans le faire bouger) est bien un effort épuisant, ce n'est pas directement considéré comme un travail puisque rien (de directement/facilement visible/mesurable) n'est produit.

On pourrait débattre sur ce point, car le fait qu'un effort exercé ne produise pas d'effet visible macroscopiquement (déplacement d'une masse macroscopique) n'implique pas qu'il n'y ait pas d'effets du tout. Ainsi pour un individu qui tente de lever une charge sans y arriver, la charge immobile, eg un plafond, joue de facto le rôle de renvoyeur de l'effort à l'intérieur même des éléments qui tentent de transmettre l'effort. Il y a de la compression de réalisée, de la tension, du stress de fibres musculaires, etc. C'est exactement la même chose pour une machine qui essaie d'exercer un effort/travail sur un objet. Si l'effort a réellement lieu et que rien de macroscopiquement visible ne se passe du coté de l'objet ... alors ce sont les éléments de la machine elle-même qui, faute d'arriver à transmettre l'effort/énergie ... vont être stressés sous l'application de l'effort. Le stress est bien réel. Dans les bons cas, il se matérialise sous forme d'usure. Dans les mauvais cas par l'endommagement des éléments les plus stressés.

Exemple 1 : un sécateur dans les mains d'un jardinier costaud et utilisé pour couper un diamètre de bois trop épais, ne va pas durer longtemps. Si l'effort exercé par la main du jardinier ne suffit pas, via le sécateur, a couper une branche trop grosse, alors c'est le sécateur lui-même qui, n'arrivant plus à transmettre l'effort, devient objet de l'effort. La branche devient de facto une "impasse" qui au lieu d'absorber l'effort, le renvoie en amont. C'est un rebond. (Et dans la chaine d'éléments transmetteurs, c'est le plus faible qui lâchera en premier (boulon, lame, etc).

Exemple 2 : Même chose pour un tracto-pelle qui s'attaque à un sol trop dur. Faire exploser une durite dans le circuit hydraulique est monnaie courante.

Dans tous ces cas, on peut même se demander si l'objet résistant, non content de ne pas absorber l'effort et de le renvoyer, ne va pas exercer un effet levier, qui va démultiplier l'effort, au-delà des limites de résistance de la machine employée.


... Coriolis verra son nom attaché à la définition physique du travail – mais le débat autour de l’unité correspondante lui échappera complètement, ainsi qu’au monde des mécaniciens d’ailleurs. (Thèse Moatti p78)

... On comprend mieux rétrospectivement pourquoi toutes ces propositions seront balayées par les unités de travail et de puissance qui viendront des électriciens : les mécaniciens ne se mettaient pas d’accord entre eux, et de plus leurs unités variaient d’un pays à l’autre – basées qu’elles étaient sur les unités de longueur et de poids, ancestrales et ancestralement différentes d’un pays à l’autre. (Thèse Moatti p80/81)



Unité

Dans la terminologie d'aujourd'hui (plutôt fixée), le travail est une énergie, ou plutôt l'une des multiples formes que peut prendre l'énergie. Etant donné ces formes multiples et cette équivalence, n'importe quelle unité de l'une des formes peut servir, par équivalence, d'unité pour le travail mécanique. Les électriciens utilisaient le volt-coulomb, les mécaniciens le kilogramètre ou le cheval-vapeur, d'autres les calories, etc. Il est apparu nécessaire d'harmoniser ces notions. Cela s'est finalement fait via l'adoption du joule.


Travail et chaleur

James Joule (https://fr.wikipedia.org/wiki/James_Prescott_Joule) est crédité de la mise en correspondance entre travail et chaleur.

Une ambiguïté à bien cerner dans le résultat de Joule : Tout travail produit toujours forcément de la chaleur. En effet, il y a toujours ce que nous appelons des "pertes" par frottement. C'est inévitable. On emploie le mot "pertes", car il s'agit effectivement d'une énergie sous une forme souvent non exploitable (et aussi pas facilement mesurable).

Dans l'expérience de Joule lui-même, Joule s'est efforcé de minimiser (ou de pouvoir mesurer) les "pertes" par frottement, "pertes" par rapport à la production de chaleur principale de son expérience (via une hélice dans de l'eau).


Bibliographie

  • James Joule - Les cahiers de Science et Vie - octobre 1995. Très bon article de François Vatin.
  • Thèse Moatti en pdf


Liens

  • "principe des forces vives" -> voir article F. Vatin p25, encart en bas à droite.